Nuit blanche, no. 166, printemps 2022
Sous la direction de Mounia Ait Kabboura et Mohamed Fadil, avec la collaboration de Martin Geoffroy et Mohammed Ababou, ALLAH ET LA POLIS. QUEL ISLAM POUR QUELLE IDENTITÉ, Les Presses de l’Université de Montréal, 2021, 260 p, ; 29,95 $
Le livre contient une série de textes de différents auteurs d’origine québécoise et marocaine, réunis dans une collaboration singulière et bienvenue. Il s’attarde de manière générale à une problématique centrale dans le monde musulman, soit la relation entre la religion islamique et le pouvoir, et l’évolution de cette relation au fil du temps.
Il n’est jamais facile de dégager un propos unificateur de ce type d’ouvrages, tant les sujets sont variés : du salafisme au Burkina Faso à l’analyse de groupes marginaux qui s’en prennent à la foi islamique au Québec. D’autant que les essais présentés s’appuient sur des notions savantes, peu accessibles au grand public. On retient notamment des groupes marginaux anti-islamiques au Québec leur « essentialisation » de l’islam, dans un « discours décomplexé », qui « normalise la haine des autres ». Et qui fait de cette religion une foi intrinsèquement de nature violente. Erreur grave, car la religion est in fine ce qu’en font les pratiquants.
Un des textes qui m’a le plus interpellé, ayant souvent voyagé au Burkina Faso : l’analyse de l’islam dans ce pays. Cette contrée autrefois si douce et agréable a, hélas, vu l’émergence d’un islam violent, intolérant. Cette vision étroite de la religion s’est même répandue dans la religion chrétienne locale, favorisant une atomisation de la société, dit l’auteur.
Un autre texte qui interpelle porte sur le mariage et la sexualité en islam : le sexe hors mariage est encore interdit moralement et normativement. Or, devant des jeunes qui s’unissent de plus en plus tard, les sociétés islamiques ont au fil du temps mis au point des bricolages juridiques, des unions temporaires, ou « mariages de jouissance » qui visent essentiellement la satisfaction sexuelle des partenaires.
L’ouvrage offre une palette de points de vue sur différents enjeux de recherches portant sur l’islam, tel que vécu dans le monde occidental et musulman. Une lecture souvent aride, mais néanmoins enrichissante sur une religion dont on n’a pas fini d’étudier la complexité, les composantes diverses de son cheminement depuis qu’il est confronté à la modernité occidentale.
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