Géopolitique des islamismes

Anne-Clémentine Larroque, Géopolitique des islamismes, Presses Universitaires de France, Paris, 126 p., 2014.

Nuit blanche, no, 139, Été 2015

Depuis les attentats de Charlie Hebdo en janvier 2015, plusieurs se sont mis à questionner plus directement les préceptes de la religion islamique, mais surtout son interprétation radicale, l’intégrisme violent. Mais pour le néophyte qui souhaite en toute objectivité appréhender avec rigueur ce phénomène, l’effort peut être rapidement découragé par la multiplication des approches et des termes collés à cette mouvance (islamisme, salafisme, radicalisme islamiste, wahhabisme, etc.), sans compter les distinguos obligés entre le sunnisme et le chiisme, les deux principales branches de l’islam.

Le livre de Mme Laroqque, maitre de conférences à Sciences Po (Paris), est une introduction au sujet et permet fort heureusement de contourner cette difficulté. Pour l’experte, « l’islamisme s’impose comme alternative politique à la vision occidentale de l’État importée par les colonisateurs ». Mais cette idéologie ne se déploie pas de manière homogène : il y a les mouvements politiques ; les missions de conversion ; et la lutte armée, violente.

Le tronc commun est un « fondamentalisme puritain » visant à renforcer l’ordre moral de la communauté. L’auteure s’attarde à raison sur l’organisation des Frères musulmans, née en Égypte il y a cent ans, l’entité la plus structurée faisant la promotion de l’islamisme dans le monde arabe. Une organisation avec deux objectifs : instaurer la charia (Loi islamique) comme source de législation et islamiser les institutions politiques et culturelles. Une islamisation, donc, par le haut, via la politique, et par le bas, par l’œuvre missionnaire, l’action de terrain.

Depuis le 11 septembre 2001, poursuit l’auteure, on assiste à la fragmentation de l’islamisme, avec l’apparition de nouvelles mouvances, cette fois territoriales : Afrique du Nord, Irak, Syrie, avec des actions de plus en plus violentes relayées par les médias sociaux.

L’auteure en arrive la la conclusion redoutable que, si l’islamisme politique a en partie échoué, car il n’a pas pris le pouvoir dans l’ensemble des États arabes, l’islamisme social a progressé, comme on le constate notamment par le port, plus répandu que jamais, du voile dans le monde musulman.

Enfin, petite erreur à corriger lors d’une prochaine édition : page 27, Sayyid Qutb, le penseur du radicalisme islamique, est un intellectuel égyptien, et non d’origine saoudienne.

 

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