Nuit blanche, no. 146, printemps 2017.
Tahar Ben Jelloun, LE TERRORISME EXPLIQUÉ À NOS ENFANTS, Éditions du Seuil, 2016, 143 pages.
Après le succès obtenu avec Le Racisme expliqué à ma fille (1998), puis avec L’islam expliqué aux enfants (et à leurs parents), publié en 2012, le prolifique écrivain français d’origine marocaine, Tahar Ben Jelloun reprend la même formule pédagogique avec Le terrorisme expliqué à nos enfants.
Sous forme d’échanges imaginaires avec sa fille, et dans un langage très accessible et sans parti pris, l’auteur de La Nuit sacrée, prix Goncourt 1987, tente de faire comprendre les motivations et les implications du terrorisme islamique en sol occidental.
Dans ce dialogue qui se lit d’un trait, l’auteur rappelle avec justesse que la terreur vise à instaurer la peur, et à faire vaciller la raison et l’intelligence. À propos, il écrit, en pensant aux populations se relevant d’un attentat : « L’émotion n’est pas bonne conseillère quand il s’agit de tracer une ligne de conduite et prendre des décisions dans ces moments tragiques » (p.24)
Le célèbre écrivain se fait très lucide sur l’islam, sa difficulté de composer avec la modernité et son instrumentalisation par les djihadistes. Il écrit : « Quelqu’un a dit : Ceux qui n’ont pas trouvé un sens à leur vie cherchent un sens à leur mort. » (p.41) Il déplore que les propagandistes islamistes, tels de néfastes spécialistes du marketing, veulent faire croire à des jeunes désœuvrés, plongés dans un vide culturel et spirituel, que le 7e siècle (naissance de l’islam) soit toujours d’actualité.
Didactique, M. Ben Jelloun rappelle avec conviction les valeurs fondamentales de la France, la liberté d’expression y étant sacrée. Il déplore que l’islam « résiste » aux réformes, qui rendraient inopérants un certain nombre de textes coraniques, et lui permettrait de renouer avec le dynamisme intellectuel qui le caractérisait entre le 9e et le 12e siècle. Malheureusement, en Orient musulman, « sectarisme et l’intolérance sont revenus en force ». (p.97) Il en appelle à un islam « apaisé, tranquille, vécu dans la sphère privée, respectant les lois du pays » (p.94)
Si l’islam s’accommode bien mal des caricatures du Prophète Mohammed et de la séparation totale du religieux et du spirituel, que le djihadisme s’obsède sur le corps de la femme qu’il faut protéger du « vice », cette religion n’est pas condamnée au statisme et à alimenter le terrorisme, bien au contraire. À tous les jours, Musulmans et non-Musulmans vivent en bonne intelligence en France…mais il y a lieu de s’inquiéter, raconte l’auteur, car l’image de la religion islamique est fortement mise à mal par les attentats à répétition. D’où l’importance de mieux intégrer les jeunes de 2e et 3e génération, notamment grâce une meilleure éducation, une pédagogie citoyenne, et une laïcité rigoureuse.
M. Ben Jelloun a produit, sans surprise dans son cas, un autre bouquin d’une clairvoyance profonde, juste et équilibré, à recommander pour tous.
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